Le feuilleton de la Cinémathèque tunisienne revient sur le tapis. Le Groupement professionnel de l’industrie cinématographique de la Conect a repris les jeudis du cinéma le 12 septembre avec un premier atelier de réflexion sur le thème «Cinémathèque tunisienne : des priorités pour une nouvelle impulsion» dans la salle Tahar Cheriaâ au Centre national du cinéma et de l’image (Cnci) à la Cité de la culture.
La Cinémathèque, inaugurée le 21 mars 2018, coïncidant avec le démarrage des activités de la Cité de la culture, représente le rêve de nombreux cinéastes et cinéphiles et l’espoir de voir enfin sauvegarder les archives qui croupissent sous les poussières d’un dépôt à la Satpec, cédée à Quinta communication à Gammarth.
Après des débuts prometteurs, «La maison familiale» comme aime l’appeler son initiateur, avec Mohamed Challouf et premier directeur Hichem Ben Ammar, les failles ont commencé à apparaître. La demeure s’est vite ébréchée et s’est éloignée des missions dont elle s’est investie. Lieu de transmission, de mémoire et de résistance, elle s’est inscrite, entre autres, comme objectif de valoriser les films du patrimoine en les restaurant et les conservant dans des conditions adéquates afin de les destiner au public d’aujourd’hui et de demain.
Selon Hichem Ben Ammar, intervenant pour un rappel historique lors de cette rencontre, «à l’origine, les trois salles de la Cité de la culture : Sophie El Golli, Tahar Cheriaâ et Omar Khlifi (350) étaient toutes destinées à la Cinémathèque». Mais, en fait, une seule salle, la plus petite, a été dédiée aux projections des films proposés par la Cinémathèque. Un travail d’archivage de la collection que renfermait le dépôt de la Satpec à Gammarth a pris plusieurs années grâce à une équipe dynamique au savoir-faire avéré. Un programme de films du répertoire mondial a été mis en place au profit d’un public devenu fidèle au fil des mois.
Or, cette embellie n’a été que de courte durée. L’argent étant le nerf de la guerre, plusieurs gros problèmes sont survenus en chemin, notamment au niveau des lignes de financement et du plan de gouvernance pour l’autonomie. En effet, les études réalisées antérieurement n’ont pas prévu l’autonomie économique de l’institution, dont le financement reste tributaire du Cnci. Si elle était un établissement public à caractère non administratif (Epna), à l’instar du Centre culturel méditerranéen de Hammamet ou encore du Centre national des arts de la marionnette avec un budget conséquent, cela lui aurait permis d’envisager les dépenses nécessaires pour le recrutement d’agents ou encore la restauration de films et l’accueil d’invités étrangers lors de rencontres ou conférences…
Malheureusement, le personnel, sous contrat CDD, est viré au bout de six mois et renouvelé avec des agents novices qui ne disposent d’aucune formation et qu’il faut initier de nouveau au métier. La programmation de films commence à s’effilocher et la restauration des œuvres filmiques subit le même sort. L’initiateur du projet et directeur de la Cinémathèque est à son tour remercié. Enfin rien ne va plus. Au bout du compte, les archives, biens de l’Etat tunisien, sont transférées à la Bibliothèque nationale (BN) et stockées sur les rayons d’un vaste espace. Triste sort pour cette «Maison familiale» décrépite et abandonnée à contrecœur par ses habitants de peur qu’elle ne leur tombe sur la tête. Aujourd’hui, les plus aguerris cherchent à sauver les meubles de ce désastre dont ils sont en partie responsables. Mais avec quel moyen et quelle énergie ?